Témoignage de Mila Giraudon et Katia Figura
Ma mère et moi avons eu la chance de voyager à travers le monde, de découvrir de
nombreuses cultures et d'approcher parfois la grande pauvreté. S’engager dans une
action humanitaire ensemble était un projet de longue date, même si nous ne savions
pas concrètement en quoi cela pouvait consister, ni comment nous allions vivre cette
expérience. Nous sommes donc parties dans le simple but d'aider, de nous rendre
utiles au sein de cette organisation.
Maison de La Gare nous a fait vivre une expérience bien au-delà de nos attentes,
bien plus qu'une simple « action ». Grâce à elle, nous avons pu approcher la vie
des talibés sous toutes ses facettes : leur quotidien de la rue, leurs besoins
rudimentaires (se laver et laver leurs vêtements), l’apprentissage des règles de
vie en société mais également leurs blessures tant physiques que morales ou encore
leurs conditions de vie si précaires dans les daaras.
Quelle émotion de les voir sourire et leur faire oublier, ne serait-ce qu’un instant,
leur « vie de rue » à travers des ateliers de loisirs créatifs, des chansons, des
enseignements de français ou de mathématiques.
Ma mère (maman de deux enfants) et moi (lycéenne de 17 ans) avons vécu différemment
cette expérience ... mais l’avons partagé pleinement, ensemble.
Nous avons été émues par ces enfants qui ne demandent que de s’évader de la misère
par leur envie d’apprendre, de découvrir, de créer et leur fierté de nous montrer
leurs beaux dessins ou leurs créations.
Le dernier jour de notre séjour, Abdou, un enfant à qui j’avais enseigné des notions
de poésie, m’a écrit un poème, très fort, et m’a annoncé qu’il venait d'être accepté
dans un lycée à Saint-Louis, le rêve de toujours de cet autodidacte. Ce fut un grand
moment d’émotion et de fierté. J’avais l’impression d’avoir contribué un peu au
"mieux vivre" d’un enfant talibé. Le rôle de réinsertion et d’alphabétisation des
enfants fait partie des missions prioritaires des volontaires et des membres de
Maison de la Gare.
Le jour de mon anniversaire restera aussi un jour à la fois "inoubliable" et
bouleversant car pour les talibés, c’est un jour comme les autres... Ces jeunes
enfants se tenaient face à moi, en chantant et dansant mais aucun d’eux ne comprenait
la signification du mot « anniversaire », la plupart ne connaissent même pas leur
date de naissance !
Effectuer une action humanitaire mère-fille nous a beaucoup rapproché ma mère et moi
et nous a permis de nous soutenir dans certains moments éprouvants.
Le dernier jour, nous avons accepté de les accompagner dans une ronde de nuit. Ce
soir-là, nous avons eu besoin l’une de l’autre pour surmonter l’image de ces enfants
dormant la nuit à même le sol dans une gare routière insalubre. Délaissés, souvent
maltraités, ils ont préféré fuir leur daara ou leur famille, et ils ont trouvé un toit
dans Maison de la Gare pour la nuit. Le lendemain déjà, tout est mis en œuvre pour
retrouver leurs familles et comprendre ce qui peut pousser ces enfants à se mettre
ainsi en danger.
Durant ces quelques jours partagés avec les talibés, nous avons pris conscience du
rôle fondamental des ONG comme Maison de la Gare qui œuvrent, au quotidien, au
mieux-être de cette jeunesse délaissée. Au-delà des missions que nous avons pu
effectuer, ce sont les valeurs de l’organisation et des personnes même qui la
constituent qui resteront à jamais gravé dans nos mémoires.
Mama Touty notre hôte a été une vraie « mère » d’accueil ; le cœur sur la main, elle
nous a accueillies comme ses enfants.
Nous avons été le premier duo mère-fille à vivre cette expérience inoubliable et nous
remercions vivement Maison de la Gare et « sa grande famille ».
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