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L'éveil culturel d’une volontaire américaine
































Kaylin Zimmer, une volontaire américaine avec Maison de la Gare


Kaylin est étudiante en science économique à l’Université de Seattle, avec spécialisation en développement économique international. Native d’Anchorage en Alaska, elle a toujours adoré les voyages et est tombée en amour avec l’Afrique lors de sa première visite, au Malawi en 2013. Depuis ce temps, elle cherchait un moyen d’y retourner et y apporter une contribution significative. La possibilité d’être stagiaire avec Maison de la Gare lui a semblé être l’occasion parfaite... une situation où elle pourrait pratiquer son français, retourner voir un continent qu’elle aime et vivre une expérience importante tout en aidant des enfants vivant dans une situation très difficile.

Le travail de Kaylin à Saint-Louis comprend sa participation à la mise en place d’un système d’enregistrement et de suivi des enfants entrants au centre de Maison de la Gare ainsi que l’enseignement des classes d’anglais, un appui aux soins dans l’infirmerie et beaucoup plus encore.

Dans ce rapport, Kaylin songe à ce qu’elle a appris en travaillant avec Maison de la Gare et les enfants talibés.

« Comme mon séjour ici tire à sa fin, je commence à réaliser (et à essayer de me réconcilier avec le fait) que, lorsque l'on travaille en tant qu’étranger dans un pays inconnu, il y a certaines choses que l’on ne peut tout simplement pas réaliser.

Le constat le plus frappant a été le simple fait que l'on ne puisse pas s’attendre à ce que le travail soit effectué de la même manière que chez nous aux États-Unis. L’une des différences que j’ai remarquées ici est que les gens font passer la vie avant leur travail. S'il y a un baptême, un enterrement, ils sont trop fatigués, leur enfant a été momentanément perdu (tout ce que j'ai entendu de diverses personnes), ce sont les choses qui viennent en premier. Ils assistent aux baptêmes et aux funérailles, ils se reposent, et ils trouvent leur enfant et passent du temps avec eux. En conséquence, l'efficacité et la diligence auxquelles je suis habituée ont tendance à en prendre un coup. Cette relation entre la vie et le travail est un sujet difficile pour beaucoup de monde, et de nations. Je crois que beaucoup de Sénégalais et Sénégalaises œuvrent pour mieux définir le meilleur équilibre entre le travail et la vie personnelle dans un pays bien en voie de développement, mais qui a encore une façon de vivre traditionnelle bien ancrée. J'ai appris de précieuses leçons de patience et de persévérance, car les deux sont nécessaires pour obtenir des résultats à long terme.

Également intéressante et stimulante a été mon expérience en tant que jeune femme blanche et agnostique venant d'un pays où rien de tout cela ne sort de l'ordinaire et où les droits de la femme sont (relativement) progressifs. En travaillant pour une organisation comme la Maison de la Gare, qui agit si intimement avec certains des musulmans profondément religieux au Sénégal, il est impossible pour moi de comprendre les nuances et les complexités de la foi islamique, ce qui limite de ce fait comment je peux être vraiment utile dans des tâches telles que la mise en œuvre de notre recensement des enfants talibés de Saint-Louis. Même si pour moi cela peut sembler relativement simple, la relation avec les marabouts ici est délicate, à la fois en raison du fait qu'ils veulent un certain avantage pour eux en échange d’informations vérifiables et du fait qu’ils puissent interpréter que ce que nous faisons à Maison de la Gare peut saper leur pouvoir, car plusieurs d'entre eux exploitent les garçons que nous essayons, justement, de sauver de l'exploitation.

Dans un pays où la religion est primordiale et où certains chefs religieux bénéficient de la maltraitance des enfants, et où les femmes sont considérées non pas comme des agents de changement mais plutôt comme des objets devant être admirés, adorés et responsables du ménage, il y a été difficile pour moi de trouver un domaine d’intervention où j‘aurais pu vraiment avoir un impact au-delà des portes du centre. Une partie de ce dont je me suis rendu compte est que, même si le mieux que j’ai pu faire fut de connaître les enfants, d’enseigner une classe d'anglais où beaucoup de talibés veulent désespérément assister et d’aider là où l'organisation avait besoin d'aide, cela suffit. Bien que j'aie aidé avec l’enregistrement des enfants et avec le recensement, les moments où je me sens la plus utile sont dans mes interactions avec les amis que j'ai faits ici, à la fois jeunes et vieux.

Et, bien sûr, ce qui affecte tout ce que j'ai mentionné et bien plus, fut le défi de travailler dans un pays qui parle ma langue seconde, mais avec un accent peu familier, et plus communément parle une langue que je ne parle pas de tout. Bien que ce soit certainement quelque chose pour laquelle je prends la responsabilité, parce que je savais où je m’en allais, et malgré que je m'attendais à ce que le français soit plus couramment parlé, je savais que le wolof était la langue non officielle du pays. C’était tout un défi que de tenter de comprendre l'ensemble de ce qui se passait autour de moi. Je rate les conversations et, même pendant les réunions où je suis présente, ils commencent souvent en français, puis digressent en un hybride français-wolof. Bien que, entre mon wolof limité, mon français et mes questions, je comprends toujours les points clés des réunions, je manque encore les nuances de la raison pour laquelle une certaine idée ne peut pas fonctionner, ou pourquoi quelque chose d'autre est mieux. Lorsque ces questions impliquent les marabouts et les obstacles touchant à eux et à leur foi, cela devient souvent encore plus confus et j’ai de la misère à saisir l’importance de la religion pour beaucoup de gens.

Mon séjour ici a été un éveil culturel, vraiment. Avant de quitter les États-Unis, on a insisté répétitivement à mes collègues stagiaires et moi sur le fait que nous allions dans un pays que nous ne connaissions pas bien, dans une organisation qui œuvre depuis assez longtemps pour savoir mieux que nous ce qu’il y a à faire, et que nous devons être prêts à comprendre leur point de vue. Bien que tout cela fut réel et que j’aie beaucoup appris, je pense que l’élément le plus important de ce que j’ai retenu a été d’être incroyablement humble, non pas parce que j’ai réalisé que je connaissais très peu académiquement ou que j’aie peu d’expérience dans un travail spécifique, mais parce que je connais si peu de la culture et de l'importance de la religion ici. Ne pas comprendre les valeurs les plus fortes du peuple limite mes façons de comprendre comment mieux travailler avec ou autour d'eux.

Mon séjour au Sénégal a été ma propre session de formation en sensibilité, ce qui m’a permis de réaliser comment les croyances des gens autour de nous influencent notre capacité ou non de progresser. Je pense que cela est une leçon que je dois continuer à apprendre, car il m’arrive souvent d’être frustrée par la lenteur à laquelle les projets sont réalisés. Cependant, j’appris également comment savoir quand ma façon d’agir peut être meilleure, et comment montrer aux autres pourquoi je fais les choses comme je les fais et pourquoi ils peuvent bénéficier de cela aussi. »