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Un jour dans la vie à Maison de la Gare
TweeterSonia LeRoy partage ses impressions d'une journée « typique »
Il y a peu d’activité tôt le matin
à Maison de la Gare. Mame Diarra, la « mère » du dortoir d'urgence, prépare le petit
déjeuner pour les petits garçons talibés, seulement Kalidou et Gorgui pour le moment
séjournant sous
son toit. Mamadou ouvre l'eau et s’occupe du jardin. Un voisin,
apercevant que l'eau est branchée, cogne à la porte toujours verrouillée et demande
s’il peut remplir sa cruche. Il est invité à entrer, comme d'habitude. Arouna
organise ses livres et son sac à dos pour l'école.
Kalidou et Gorgui se lèvent finalement et profitent de leur petit déjeuner. Puis
ils s’amusent pendant un certain temps à botter le ballon de foot. Après tout, ceci
n'est pas un daara où les talibés sont envoyés à la rue mendier leur petit déjeuner
ainsi que leur quota d'argent dès le lever du jour.
Vers 10 heures du matin, Noël s'installe avec son ordinateur à la porte d'entrée ;
il accueille chacun des talibés, enregistrant son nom et son daara, alors qu'ils
commencent à défiler à travers la porte qui est maintenant ouverte. Certains
confient à Noël leurs sébiles et les pièces de monnaie qu’ils ont pu mendier plus
tôt le matin ainsi que leurs divers petits trésors, afin de pouvoir jouer les mains
libres.
En peu de temps, la bibliothèque s’est remplie d'enfants demandant à Bathe de faire
jouer un film. Et à l’extérieur, un match de football animé
est en cours
dans l'enclos sableux. Un bon coup de pied endommage les bougainvilliers
déjà bien amochés. Un autre, le bananier. Mamadou grimace quand un autre ballon
manque de peu les fruits de son bananier. Puis il hausse les épaules et se joint à
la partie. Soudain, le ballon est projeté au-dessus du mur en raison d'un coup de
pied trop enthousiaste. L’un des joueurs, petit et léger, est hissé sur le toit des
salles de classe. Il se retrouve vite de l'autre côté du mur. Le ballon revient et
le jeu reprend. Peu de temps après, le garçon est également de retour après être
passé par la porte d'entrée. Beaucoup d'enfants profitent de la série de douches et
de toilettes. Ils s'occupent les uns les autres, confiant leurs vêtements sales les
uns aux autres pour les surveiller pendant qu'ils se douchent.
Les enfants se présentent tout au long de la matinée à l'infirmerie, arrivant seul ou
deux par deux. Awa, l'infirmière, s’occupe de leurs blessures et de leurs maux de
dents, examine et traite leurs infections et généralement leur donne de la tendresse
et des gestes d’affection dont ils ont tellement besoin.
Les cours de karaté commencent vers 11 heures du matin. Les enfants attendent à la
porte de la pièce où les uniformes de karaté sont triés, prêts à être portés. Même
les plus petits mettent leur propre gi et nouent leurs ceintures. Les enfants qui,
quelques minutes plus tôt, se roulaient dans le sable, couraient partout en haillons
ou mendiaient pieds nus dans la rue sont maintenant alignés en rangées disciplinées,
fièrement vêtus d’uniformes blancs et propres, attentifs et désireux d'apprendre.
Ils comprennent qu'ils font partie de quelque chose de spécial. L'instruction dure
un peu plus
d'une heure. La classe est divisée en groupes débutants et avancés. Un
plus grand nombre de talibés sont assis tout autour et regardent avec attention et
curiosité. Peut-être, eux aussi envisagent de devenir étudiants de karaté.
Comme le soleil s’élève plus haut dans le ciel africain, de plus en plus d'enfants
se dirigent vers la bibliothèque ou le jardin. Ils jouent, ils parlent ou tout
simplement flânent à l’ombre, oisifs, profitant de leur liberté.
Après quelques heures, les enfants retournent dans la rue et les portes de Maison
de la Gare sont fermées. Les garçons ont les quotas de mendicité à respecter.
Et, dans de nombreux cas, ils doivent retourner à leur daara pour un peu
d'enseignement coranique.
Plus tard dans l'après-midi les portes de la Maison de la Gare sont ouvertes de
nouveau. Kalidou et Gorgui
ont été nourris et ont bénéficié d'une sieste.
Mamadou probablement aussi. Arouna revient de l'école. Il a une pause de quelques
heures, le temps d'aider au besoin à Maison de la Gare. Arouna, lui-même talibé
mendiant jusqu'à l'année dernière, est une source d'inspiration pour beaucoup des
enfants. Certains des enfants qui ont visité le centre le matin reviennent, une
fois leurs quotas de mendicité remplis et remis à leur marabout. Mais, il y a
aussi un groupe de talibés différents. Les classes d'alphabétisation ont lieu
dans l'après-midi, et les enfants qui veulent apprendre sont réunis, en attendant
que les enseignants arrivent. Les jeux reprennent. L'infirmerie est de nouveau
en action. Plus d'enfants se dirigent vers les douches ou lavent leurs vêtements.
Pendant tout ce temps, les enfants restent attentifs, impatients de voir arriver
leurs enseignants.
Lorsque Bouri, Aida et Abdou déverrouillent les portes de leurs salles de classe,
les enfants commencent à s'y diriger. Certains des plus âgés qui étudient avec
Bouri espèrent apprendre suffisamment pour pouvoir s’intégrer au système scolaire
public très bientôt.
Ces garçons sont impatients et diligents. Certains des plus
petits ont besoin d'un peu d'encouragement à mettre de côté le ballon et à assister
à la classe. Cependant, beaucoup considèrent cette activité comme une opportunité
pour eux, et ils se rendent diligemment vers leurs classes.
Peu de temps avant la fin des classes, quelques enfants, les "talibés du dojo"
doivent partir tôt pour leur formation au dojo Karaté-Sor. Après les cours, la
nuit descend et chaque enfant reçoit un petit repas. Puis, après quelques moments
de fraternisation et salutations, ils quittent les uns après les autres, se disant
... « Ba souba », « à demain » ... puis se dirigent dans l'obscurité vers leurs
daaras respectifs. Tout est tranquille à Maison de la Gare une fois de plus.