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La journée des talibés – Un moment pour fêter, même dans la tristesse
TweeterSonia LeRoy partage ses impressions et ses sentiments d’une journée incroyable
« La Journée mondiale des
talibés est célébrée dans tout le Sénégal et elle a certainement été
bien célébrée
par les enfants talibés de la Maison de la Gare.
La Journée des talibés est un jour férié pour les enfants de la rue du Sénégal.
Des organisations à but non lucratif, notamment Maison de la Gare, ont mis en place
des programmes spéciaux pour les enfants, avec des jeux et de la nourriture.
Quelques manifestations ont été organisées par certaines associations pour
sensibiliser la population au sort des talibés. Mais, pour les centaines de
talibés au centre ce jour-là, c'était l'occasion de se détendre et de profiter
de la fête.
La journée a commencé comme la plupart des autres jours. Peu de temps après
l'ouverture des
portes de Maison de la Gare, les enfants commencèrent à s'infiltrer
en un filet qui se transforma bientôt en un courant régulier. Vers dix heures du
matin, les enfants de karaté ont commencé à arriver et à mettre leurs gi en
préparation pour le cours de vendredi matin. Alors que les étudiants de karaté se
regroupaient sur le sable avec leur sensei, des jeux commençaient sous la treille
de vigne dans le jardin, tandis que d'autres garçons escaladaient les vignes comme
si c'était un gymnase dans la jungle. Certains enfants se sont rendus à
l'infirmerie pour se faire soigner et ont reçu des soins de la part des infirmières
Abibou et Awa.
Je ne l'avais pas réalisé jusque là, mais c'était avec une terrible tristesse que
j'ai appris que Seydou, le petit talibé mal nourri vivant dans le dortoir
d’urgence, avait disparu
la nuit précédente. Une recherche frénétique de
plusieurs heures dans le quartier n'a rien donné. Un rapport a été fait à la
police, mais il n'y a pas beaucoup d'espoir de le trouver par ce moyen. Pourquoi
s'était-il enfui ? Seydou développait une relation de confiance étroite avec un
volontaire belge et semblait heureux d'être à la Maison de la Gare. Aurait-il pu
être enlevé ? Est-ce que quelque chose l'a effrayé ? Comment pouvons-nous le
savoir, et comment pouvons-nous le trouver ? Il ne pourrait pas survivre
longtemps par lui-même, compte tenu de l'état d'affaiblissement dans lequel il se
trouvait. Un tel événement chez nous au Canada serait un drame épouvantable qui
interpellerait toute la société. Ici, il semble que ce soit une autre tragédie
africaine triste, mais pas rare. Espérons que Seydou sera retrouvé et ramené
dans cet endroit sécuritaire.
Pendant ce temps, les enfants continuaient à arriver. Beaucoup regardaient les
karatékas en action. Un adorable petit garçon se tenant à l'écart pratiquait sa
propre version de oizuki.
Un futur karatéka peut-être. D'autres talibés
entamèrent une partie de foot avec enthousiasme. Alors que le ballon disparaissait
au-dessus d’un mur de plus de deux mètres, un petit garçon talibé fit de même dans
l'espoir de la retrouver, ce qu'il réussit.
Dans l'après-midi, un plus grand nombre d'enfants est arrivé au centre. Les deux
salles de classe étaient pleines d'étudiants se concentrant sur leurs études
pendant que dehors, l'ambiance se réchauffait. L'enseignant Abdou Soumaré a
organisé une diffusion de musique par haut-parleurs pendant que lui et certains
talibés aînés se relayaient au micro pour animer la foule joyeuse.
Étonnamment,
les élèves dans les classes continuaient à se consacrer à leurs études ne se
laissant pas distraire par l'agitation et l'excitation qui avaient lieu juste à
l'extérieur de la fenêtre.
Lala Sène, bénévole régulière au centre et membre de l'équipe nationale de football,
organisa un tournoi de foot pendant qu'une sauterie déroulait sur le terrain de
sable, juste à côté. Chaque fois qu'une équipe marquait un but, tout le monde
éclatait en acclamations et en applaudissements, puis la partie de foot et la danse
reprendraient. Pendant ce temps Oumou, la cuisinière, préparait
un mélange
nutritif pour les sandwichs qui nourriraient la foule. Les talibés aînés ont aidé
à hacher les poivrons et d'autres ingrédients à ajouter à la préparation.
Abdou a pris le micro, menant les enfants comme le joueur de flûte, tout autour de
l'enceinte de Maison de la Gare pendant que le personnel et les talibés aînés
aidaient frénétiquement à préparer des sandwichs pour des centaines de célébrants
affamés.
Finalement, on a déclaré l'équipe gagnante et le grand trophée a été décerné et
circulé autour du centre dans un tour de victoire et les gagnants ont été reconnus
et célébrés avec tous les honneurs par la foule.
Puis la ligne du dîner s'est formée. Il semblait impossible qu'il y ait de la place
pour tout le monde, ou que le repas puisse être distribué
dans un minimum de calme
et d'ordre. Mais, le personnel chevronné de Maison de la Gare l'avait déjà fait et
tous furent nourris, au moins pour cette fois.
Alors que les derniers sandwiches étaient servis, Abdou a remis la musique et la
danse a repris malgré l'heure tardive et l'obscurité. Même mon père est devenu un
peu fou, dansant comme un adolescent. C'était le moment de laisser libre cours à
cette émotion refoulée. Naturellement, personne ne voulait que cette fête magique
se termine et les volontaires, le personnel et les talibés mettaient de côté leurs
inquiétudes et se réunissaient pour célébrer la vie un peu plus longtemps. »