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Il y a-t-il un espoir pour que des enfants talibés puissent réaliser leur rêve d'une éducation?
TweeterLes enfants sont prêts et Maison de la Gare s’efforce d'éliminer les obstacles
L’un des objectifs de la Maison
de la Gare est d'instruire les enfants talibés mendiants de Saint-Louis. Le
Président fondateur, Issa Kouyaté, a toujours cru que la scolarisation est la
clé de la réussite pour ces enfants. L'éducation est vitale pour leur espoir
d'une vie meilleure pour eux-mêmes. Et, les talibés instruits peuvent également
être un facteur déterminant dans la lutte pour mettre fin à la mendicité forcée
au Sénégal. Les gens
informés sont moins enclins à souffrir de l'exploitation
d'eux-mêmes ou dans la société en général.
Arouna Kandé est un brillant exemple. Malgré l'expérience d’avoir subi
l'exploitation et de la mendicité forcée depuis sa petite enfance jusqu'à
l'année dernière, Arouna a étudié pendant des années. Suite aux années dans
les classes à Maison de la Gare, il a été inscrit dans le système scolaire
national, parrainé par la Maison de la Gare. Arouna est beaucoup plus âgé
que les autres étudiants de son niveau, des étudiants qui n’ont jamais été
obligés de livrer un quota quotidien d'argent à un marabout corrompu. Mais
cela ne décourage pas Arouna. Il vise à progresser à l'école secondaire l'année
prochaine et, plus tard, à l'université. Son projet de carrière est de devenir
un écrivain. Il est déterminé à informer les gens du Sénégal ainsi que le reste
du monde sur la mendicité forcée et à contribuer à la fin de ce système néfaste
d'exploitation des talibés.
Bouri M'Bodj Diop a été enseignante à Maison de la Gare depuis 2011, prenant en
charge des enfants talibés qui avaient déjà certaines compétences de base en
français.
Bouri travaille actuellement à la préparation d'un groupe de dix-neuf
garçons talibés en vue de leur inscription au système d'éducation formelle. Cela
n'a pas été difficile pour elle d'identifier des candidats potentiels. Beaucoup
d'enfants, conscients de l'exemple d'Arouna, sont heureux d'avoir une possibilité
similaire d'être inscrits à l'éducation formelle. Pour encourager ses candidats
à prendre leur éducation au sérieux, Bouri a donné à chaque élève un sac à dos,
des crayons, et un cahier personnalisé. Ceci distingue ces enfants des autres
étudiants à Maison de la Gare et leur fournit une motivation supplémentaire.
Chaque enfant arrive pour les cours prêt à travailler, son sac à dos fièrement
en vue.
La préparation pour l'école et l'inscription n'est pas facile et ne va pas de soi.
Beaucoup d'enfants ont l'âge suffisant pour étudier au secondaire, mais ils auront
des années d'éducation formelle devant eux avant de pouvoir éventuellement entrer
au lycée. Et, ils seront probablement les seuls talibés dans leur école, comme
Arouna l'a été. En conséquence, ils vont probablement subir la discrimination et
être ridiculisés.
Mais, ils savent qu'Arouna l'a fait avec succès. Et, ils savent
qu'ils auront son soutien et le support et l'encouragement de Maison de la Gare.
Ainsi, ils ont hâte de commencer malgré les défis qui les attendent.
Inscrire les enfants à l'école nécessite non seulement la préparation pédagogique,
mais aussi l'organisation de documents et l'acquisition des autorisations
nécessaires. La plupart des enfants talibés n'ont aucun document officiel de
quelque nature que ce soit. Les certificats de naissance ou d'autres documents
d'identité tel que l'acte d'état civil seront nécessaires ainsi que la permission
du marabout, qui est légalement
reconnu comme le tuteur dans de nombreux cas. Et, dans les cas où les parents peuvent
être identifiés dans leurs villages éloignés, leur autorisation doit être obtenue.
Dans de nombreux cas, ni les parents ni les marabouts ne peuvent lire ou écrire
eux-mêmes, et ne doutent même qu’aller à l'école soit une bonne idée.
Pour espérer pouvoir inscrire ces enfants en septembre, Bouri et Issa doivent
commencer maintenant, des mois à l’avance, à discuter avec les marabouts de la
possibilité d’obtenir leur autorisation ainsi qu’une réduction des quotas de
mendicité pour les jours d’école. On ne cherche jamais à opposer les enfants à
leurs marabouts. S’il semble y avoir de l’espoir avec le marabout,
alors la recherche ou la création de documents et de photographies doit commencer.
Des visites aux villages d’origine peuvent être requises.
Bouri croit que plus de
la moitié de ses étudiants seront prêts pour l’école cette année. Mais, combien
d'entre eux auront la possibilité de commencer à temps, étant donné les défis et
les barrières à la scolarisation ?
Certains des talibés dans la classe préparatoire sont prêts à être libérés de leurs
marabouts. Mais cela présente également des complications. Dans certains cas, la
libération est automatique après un certain nombre d'années de mendicité forcée, dix
ans par exemple. Dans d'autres cas, elle est acquise de facto à l’âge de 18 ans.
Cependant, dans la plupart des cas les marabouts sont réticents à abandonner leurs
sources de revenus ou le «prestige» d'avoir autorité sur un enfant et ils exigent
des pots de vin exorbitants des enfants sous forme d'un paiement final élevé. Ou
alors, ils vont les libérer après l’âge de 18 ans, mais seulement à condition qu'ils
retournent dans leurs villages d'origine, même s'ils n'y ont plus de famille.
Malheureusement, en dépit de l'illégalité de la mendicité forcée au Sénégal, les
autorités semblent réticentes à intervenir dans ces questions.
Un autre défi pour les talibés est qu'une fois « libérés » de la mendicité forcée
en quittant
leurs daaras, où vont-ils vivre ? N'ayant pas encore acquis les
compétences pour vivre de façon indépendante, de nombreux enfants qui ont l’option
de partir continuent pourtant de vivre dans leurs daaras, avec les marabouts qui
continuent de les exploiter. Le nouveau Foyer de transition dans le centre de
Maison de la Gare offre une solution pour certains de ces garçons. Mais, est-ce
que leurs marabouts leur permettront d'y habiter ? Si un enfant s'installe dans
le Foyer de transition chez Maison de la Gare contre la volonté de son marabout,
tous les talibés de ce daara vont probablement perdre l'autorisation d'assister
aux programmes de Maison de la Gare.
Souleymane est prêt pour l'école et est impatient de commencer. Il est également
"libéré" de son marabout. Toutefois, il devra probablement retourner en Gambie
temporairement pour mettre fin officiellement à l'autorité de son marabout sur
lui. Ce voyage aura ses propres dangers et complications pour Souleymane.
Va-t-il retourner à Saint-Louis pour commencer son éducation formelle ? Comme
un talibé trafiqué, apporté par son marabout d'un autre pays, pourra-t-il s'inscrire
dans le système scolaire du Sénégal ? Sinon, a-t-il espoir de recevoir une
éducation dans sa ville natale ?
Maison de la Gare aide les enfants à naviguer parmi tous ces défis, pour que les
talibés de Saint-Louis puissent obtenir une éducation formelle.