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« Chaque moment est un cadeau de la vie » - Thich Nhat Hanh


































Lydie Teixidor raconte le formidable impact réalisé par l'Asociación Jerejef


Ils sont restés seulement une semaine, mais quelle semaine !

Quand Amaia Alonso nous a contactés pour nous dire qu’elle avait vu le travail que faisait Maison de la Gare et que son association voulait nous apporter son soutien, nous n'avons pas imaginé à quel point elle marquerait le quotidien du centre et surtout celui des enfants.

Le nom de l’association, « Jerejef » (merci en Wolof), n’aurait pas pu être mieux choisi, et nous ne les remercierons jamais assez pour le soutien physique, psychologique et émotionnel qu'ils ont apporté.

Ils sont arrivés un lundi matin tel un ouragan et ont renouveler l’énergie du centre. Après une brève réunion où ils ont posé mille et une questions concernant la situation des enfants de la rue, les travaux à effectuer ont été définis et répartis.

Ils se sont mis au travail et ont impliqué tout le monde. Ils étaient quinze, quinze Espagnols à travailler dans le centre ; le mot solidarité n’a jamais eu autant de sens. Le début a été un peu difficile parce qu’ils venaient avec l'esprit « toubab » mais, au Sénégal, les choses vont plus « nank nank » (doucement). Il faut savoir prendre le bon rythme sans se stresser. La curiosité des enfants augmentait au fur et à mesure qu’ils voyaient les volontaires s’activer et, comme ils adorent se sentir utiles, ils étaient ravis de pouvoir collaborer.

L’infirmerie a été mise sens dessus dessous et déplacée dans le hall du dortoir durant le temps des travaux. Awa, l’infirmière, en était toute bouleversée. Les volontaires qui soignaient les enfants ont fait un travail extraordinaire ; ils se sont occupés des enfants du matin au soir avec tendresse et bonne humeur sans relâche, sans flancher. L’infirmerie est l’un des endroits les durs du centre ; c’est en soignant les plaies, la galle, etc. que l’on s’aperçoit vraiment de la souffrance qu’endurent ces enfants.

La ronde de nuit qu’ont fait les volontaires avec Bathe pour récupérer les enfants en fugue fut la tâche la plus difficile et triste pour eux, mais cela leur a permis de voir l’énorme travail de terrain que fait Maison de la Gare en récupérant ces enfants et en les amenant au dortoir d'urgence du centre pour les mettre en sécurité. C’est une expérience assez traumatisante de voir que des enfants en bas âge préfèrent dormir dans la rue, où ils sont exposés à tous les dangers, au lieu de rentrer au daara de peur de se faire battre.

Les enseignants Abdou et Tata Aïda et surtout les enfants étaient très contents d’avoir plus d’éclairage dans les salles de classe ; il faut dire que les volontaires étaient des bricoleurs hors pair.

Ils ont repeint trois cases et ont impliqué les enfants qui repartaient fiers d’eux et un peu tachés de peinture, mais très heureux.

Le centre était en effervescence. Il y avait des toubabs partout qui s’activaient et de là sont nées beaucoup d’amitiés. Le menuisier a travaillé sans relâche côte à côte avec l'un des volontaires ; ils ont beaucoup appris l’un de l’autre.

Imam est allé tous les jours avec deux volontaires à Bango, au terrain où les plus grands cultivent un jardin. Elles lui ont appris comment cultiver l’artémise et en apprécier les qualités ; elles ont beaucoup rigolé malgré le travail, car Imam est un comédien né et je pense qu’Iman a trouvé en elles les tantes que tous les enfants devraient avoir près d’eux.

Et malgré tout le travail qu’ils accomplissaient tous les jours, ils ont tous trouvé un moment pour les enfants, soit pour jouer au football ou à la lutte sénégalaise, soit pour danser au son du djembé ou pour simplement parler avec eux ... bien qu’ils ne parlaient pas la même langue, ils parlaient avec le cœur.

Ce fut une semaine inoubliable autant pour les volontaires que pour les enfants et les membres de Maison de la Gare, une semaine de solidarité, d’amitié, de bonne humeur et de partage. Mais s’il y a un jour que nous ne sommes pas prêts d’oublier, c’est celui de la fête de départ et de remerciement. Les enfants se sont donnés le mot. Ils étaient très nombreux ce jour-là et voulaient remercier leurs nouveaux amis pour tout ce qu'ils ont fait et leur dire au revoir. Ils ont dansé en groupe au son des djembés et ils ont ri ensemble ; l’ambiance était plus que magique. Il n’y a pas de mots pour décrire ce moment.

Chaque membre du centre a remis un diplôme au volontaire avec lequel il avait travaillé toute la semaine. C’était une surprise pour les remercier. Dans la société sénégalaise, les émotions ne se montrent pas trop, mais ce jour-là tous ont eu plus que quelques larmes aux yeux. Awa est venue vers moi et s’est blottie dans mes bras pour essayer de cacher l’émotion. Elle tremblait tellement et pleurait à chaudes larmes. Elle était trop heureuse des améliorations de l’infirmerie, de tous les médicaments apportés et surtout que les enfants puissent enfin avoir une table de soin.

Et le summum a été atteint quand le cracheur de feu a donné son spectacle. Les yeux des enfants étaient prêts à sortir littéralement de leurs orbites ; ils ne pouvaient pas plus les écarquiller. Ils étaient stupéfaits et immobiles, chose impossible pour eux, comme le savent ceux qui les connaissent ! On a tous eu les larmes aux yeux ; quand on connaît le quotidien de ces enfants et qu’on a la chance de pouvoir les voir heureux, ne serait-ce qu’un instant, l’émotion est très forte.

Personne ne voulait que la soirée se termine ; c’était tellement beau et émouvant. Mais les enfants doivent rentrer au daara ; sinon ils se font punir. Le plus difficile a été de crever cette bulle de bonheur et de les faire rentrer à contrecœur.

Les enfants ont continué à parler des toubabs et ont demandé de leurs nouvelles longtemps après leur départ. Quand ils regardent le mur, le logo de Jerejef bien visible sur l’une des cases, ou les bancs qu’ils ont peints ensemble, un sourire se dessine sur leur visage. Ces enfants n’oublient pas ; ils sont très reconnaissants…