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Cinq garçons en cavale
TweeterUne des dizaines d'histoires de garçons désespérés secourus par Maison de la Gare et réintégrés au sein de leurs familles
À 23 heures un vendredi soir, Mamadou Gueye, membre de l'équipe des rondes de nuit de Maison de
la Gare, reçut un appel de la police de la ville de Rosso, à la frontière mauritanienne à une
centaine de kilomètres au nord-est de Saint-Louis. Ils avaient trouvé cinq garçons dans la rue
et appelèrent Mamadou parce qu'ils le connaissaient depuis la campagne de sensibilisation que
Maison de la Gare y avait menée quelques années auparavant. Mamadou se rendit immédiatement à
Rosso et au retour, amena les garçons au dortoir d’urgence de Maison de la Gare aux petites
heures le lendemain. Les cinq garçons passèrent le week-end au dortoir.
Comme cela arrive souvent avec les garçons en fugue, le lundi matin, ils n'ont pas voulu dire
à Mamadou d'où ils venaient. Cependant, ils ont fini par lui dire que leur daara se trouvait
dans une petite ville
assez proche de Rosso. Mamadou connaissait le chef de village grâce à
la campagne de sensibilisation, il l'a donc appelé pour obtenir le nom et le numéro du marabout.
Lorsque Mamadou a joint le marabout, il s'est avéré qu'il était à Dakar, laissant son grand
daara à la charge des grands talibés, les garçons plus âgés qui sont souvent les pires
auteurs de délits.
Le marabout appela son daara et demanda à l’un des grands talibés d'aller à Saint-Louis pour
ramener les garçons. Lorsque ce grand talibé arriva au centre de Maison de la Gare vers 14
heures, Mamadou n'a pas voulu lui confier les garçons. Il a rappelé le marabout et lui a dit
qu'il devait venir lui-même. Le marabout fait fit alors venir deux autres grands talibés
à Saint-Louis.
À ce moment-là, cependant, Mamadou se rendait compte qu’il devait trouver les familles
lui-même. La première fut la plus facile à trouver : l'un des garçons connaissait le numéro
de téléphone de sa mère et le donna à Mamadou. Lorsque Mamadou l’appela, il apprit qu’elle
était fonctionnaire et qu'elle vivait près de Dakar. Elle fut choquée d'apprendre ce qui
était arrivé à son fils, et elle arriva à 22 heures le lundi soir pour le récupérer. Ils
arrivèrent à la maison à 4 heures du matin le mardi, et la mère a décidé de le garder à la
maison maintenant, et ne l’enverra plus au daara.
Retrouver la famille du deuxième garçon fut plus difficile. Ce dernier nous a donné l'adresse
de sa grand-mère à Rufisque, juste à l'est de Dakar. Mamadou a des contacts avec ADE, Avenir
de l'enfant, une autre organisation de protection de l'enfance engagée dans le soutien et la
réinsertion des enfants talibés. ADE est active à Rufisque, et ils ont accepté d'aider.
L'adresse de la grand-mère s'est avérée incorrecte. L'enfant a alors donné une nouvelle
adresse, et cette
fois-ci ADE a pu retrouver les parents. Ils sont également venus à
Saint-Louis pour récupérer leur fils, et ils ont accepté qu'il vive dorénavant chez eux.
Le troisième garçon n'a pas voulu donner d'informations, mais il s'est avéré que la mère du
premier enfant connaissait la famille du troisième garçon, également à Dakar. Mamadou a pu
les joindre par téléphone, et ils sont également venus chercher leur fils.
Le mardi soir, il ne restait plus que deux garçons dans le refuge, et ils ont commencé à
s'inquiéter de ce qui allait leur arriver. Finalement, le quatrième garçon a donné le numéro
de téléphone de ses parents à Mamadou, et eux aussi sont venus récupérer leur fils.
Le cas du cinquième garçon a été plus difficile. La police de Rosso a indiqué que c'était
la cinquième fois qu'il était arrêté. En fait, le marabout était venu le lundi pour ramener
ce garçon dans son daara mais, lors de nos rondes nocturnes du mardi, Mamadou l'a retrouvé
dans la gare routière de Saint-Louis. Après beaucoup d'efforts, il a pu obtenir le numéro
de téléphone des parents du garçon auprès d'un deuxième marabout. Jeudi, ils sont venus
ramener leur garçon chez eux. La photo ci-jointe montre ce garçon dans des vêtements neufs,
véritablement heureux de retrouver sa famille.
Ce n'est qu'une des dizaines d'histoires de ce genre qui se déroulent chaque année. Grâce
à Mamadou et à Maison de la Gare, ces cinq garçons ont retrouvé leurs familles et ne seront
plus soumis à la mendicité forcée dans des conditions inhumaines dans un daara abusif.