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Trois mois avec les enfants talibés





























Une fenêtre précieuse sur un monde différent, et une chance de faire une différence.


Mon séjour à Saint-Louis avec Maison de la Gare et les enfants talibés a été de loin l'expérience la plus significative et la plus durable que j'ai eue à vivre dans et avec une autre culture. J'ai vécu pendant 15 ans dans des pays européens autres que mon Allemagne natale. Je ne peux comparer le Sénégal, ses habitants, leur culture et surtout les enfants talibés et mon travail avec eux chez Maison de la Gare à aucune autre expérience que j'ai eue auparavant. Tout semblait si différent... le climat, le mode de vie, la manière dont les gens interagissent entre eux, mais aussi la pauvreté et la misère avec lesquelles beaucoup doivent vivre. Cela n'a pas toujours été facile. Je me suis parfois sentie étrangère et seule, mais c'est probablement une partie de l'expérience qui vous confronte à vos propres limites. Pour rien au monde, je n'aurais voulu manquer cette occasion.

Lorsque j'écris ces lignes maintenant depuis l'Allemagne, mes pensées et mon cœur reviennent immédiatement à Maison de la Gare, où je me renvois parlant avec le personnel formidable, avec Issa Kouyaté le fondateur, avec Adama, l'âme du centre, avec Lalla, Noël, Awa, Alagie, Kalidou, Samba, Abou Sy, El Hadj et tant d'autres ! Je revois tous les enfants et je suis heureuse d'avoir pu faire partie de tout cela pendant un certain temps.

Avant de quitter l'Allemagne, je m'étais demandé si le sort des enfants des rues ne serait pas trop difficile à accepter pour moi. Je me suis répété que je ne devais pas m'attacher émotionnellement aux enfants, car je les quitterais au bout de trois mois. Je ne savais pas non plus comment la communication fonctionnerait puisque je ne parle pas le wolof. Ce sont toutes des questions et réflexions pertinentes, mais je sais maintenant que chaque volontaire peut trouver une place importante là-bas. Il suffit d'être attentif, ouvert, intéressé, curieux, aimant et très patient. Tout le reste s'arrangera tout seul. Cette expérience a été très enrichissante pour moi.

Personnellement, j'ai apprécié de rejoindre les charmantes enseignantes Aïda et Bouri le matin pour pratiquer l'écriture et la lecture en français avec les enfants, chanter avec eux et élaborer des projets créatifs. Et l'après-midi, je me consacrais aux enfants plus âgés en travaillant avec Kalidou, le professeur d'anglais très engagé, lui-même ancien talibé. Nous travaillions si bien ensemble. Mes élèves d'anglais étaient merveilleux, très enthousiastes et extrêmement reconnaissants pour les cours. Cela m'a beaucoup touchée et j'ai pris tout le monde dans mon cœur. J'ai également aidé à l'infirmerie et j'ai accompagné Alagie dans plusieurs daaras où nous avons traité des enfants contre la gale.

La célébration de Noël à Maison de la Gare m'a également beaucoup marquée. Je n'ai jamais rien vécu de tel dans ma vie ! Plus de 900 talibés y ont participé. La fête a duré toute la journée. Le programme était chargé et les enfants étaient ravis et heureux. L'éclat de leurs yeux, leur joie et leur vivacité ne peuvent laisser personne indifférent.

Cette fête a peut-être fait pencher la balance en faveur de mon idée d'organiser moi-même une petite fête pour les enfants avant mon départ. Même avant Noël, j'ai vu un enfant plus âgé faire du rap avec deux amis dans l'atelier de couture, et j'ai été fascinée. J'ai pensé que les autres talibés aimeraient cela aussi. Cependant, comme nous ne pouvions pas accueillir les rappeurs à la fête de Noël, Boubacar, de l'équipe, m'a suggéré de choisir un jour avant mon départ pour l'Europe pour organiser la fête. L'événement a été baptisé "Rap & Break Talibés", car des break dancers devaient y participer.

Grâce aux dons des membres de mon groupe en Allemagne, "Viajante", nous avons pu couvrir les frais d'une scène avec un bon système de musique, des baguettes avec une délicieuse tartinade préparée avec amour par la cuisinière Oumou et ses nombreux assistants, les rappeurs, et quelques prix pour les meilleurs danseurs parmi les talibés. Les break dancers que nous avions engagés ne sont pas apparus mais, miraculeusement, des talents inconnus sont montés sur scène et ont fait vibrer les talibés. J'ai été très émue de voir à quel point tous les "artistes" mettaient de leur cœur et de leur âme dans leur danse, et comment ils communiquaient avec les enfants et les encourageaient. Je n'oublierai jamais cette fête.

Mon séjour à Saint-Louis et à Maison de la Gare a provoqué en moi une grande prise de conscience et soulevé de nombreuses questions sur notre mode de vie et sur les choses que nous considérons comme acquises en Europe. C'est différent pour tout le monde, mais dans mes conversations avec d'autres volontaires, j'ai trouvé de nombreux points communs. Je ne peux qu'encourager tous ceux qui souhaitent s'impliquer socialement à participer activement à Maison de la Gare pendant un certain temps et à vivre leur propre expérience. J'ai un profond respect pour Issa Kouyaté, le fondateur de ce centre pour les garçons talibés, et pour le travail de son équipe profondément dévouée. Maison de la Gare et les enfants méritent tout le soutien possible. Ils me manquent beaucoup.
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L'auteure Katharina (Katrin) Nussbaum a été l'une des sept volontaires à Maison de la Gare à la fin de l'année 2022 et au début de l'année 2023, âgés d'une vingtaine d'années à une cinquantaine. Pour chaque volontaire, l'expérience est déterminante, tant pour eux-mêmes que pour les enfants dont ils touchent la vie. Nous invitons toute personne intéressée à envisager de devenir volontaire à cliquer sur ce lien.