MDG actualités

Deux récits de renouveau



































L'histoire de chaque apprenti qui a réussi est un petit miracle


Nous vous avons récemment fait part des progrès encourageants réalisés dans le cadre de notre programme d'apprentissage de la couture, puisque onze jeunes talibés ont achevé le programme et se sont engagés sur la voie de l'autosuffisance (« Une chance dans la vie » sur ce lien). L'histoire de chacun de ces garçons est un hommage au courage dont ils ont fait preuve pour triompher d'une incroyable adversité, de véritables histoires de transformation et de la victoire de l'espoir sur le désespoir. Le parcours de deux de ces aspirants entrepreneurs est relaté.

Samba

Samba est né dans une famille très pauvre vivant en Casamance, au sud du Sénégal, et a été envoyé très jeune apprendre le Coran dans un daara de Saint-Louis. Il a un esprit indépendant et refuse de céder aux abus et à la répression qu'il subit dans son daara. Samba ne veut pas être dans son daara, et il ne veut pas non plus rentrer chez lui, car il dit que ses parents le renverront simplement au daara puisque le marabout est l'oncle de sa mère.

Le marabout de Samba est très dur et l'oblige à mendier pour un quota quotidien d'argent. Il est régulièrement battu et vit dans des conditions pitoyables comme beaucoup de talibés, privé de nutrition, de traitement médical, d'éducation formelle et d'un abri adéquat. Il est gravement intimidé psychologiquement.

Samba avait été présenté au centre de Maison de la Gare par d'autres enfants talibés et il aimait s'y rendre. Il participait régulièrement aux matchs de football et a bénéficié du programme de karaté. Cependant, son marabout lui a interdit de participer à ces programmes et lui a confisqué son uniforme de karaté. Samba a néanmoins persisté à venir au centre, disant que c'était la seule joie de sa vie. Plusieurs fois il a bénéficié des soins à l'infirmerie.

Finalement, Samba s’est enfui, ne supportant plus les sévices qu'il subissait dans son daara. Ses parents ont refusé qu'il rentre à la maison. Il n'avait donc nulle part où aller et a passé de nombreux jours et de nombreuses nuits seul et vulnérable dans la rue. C'est là que l'équipe de Maison de la Gare l'a trouvé, après qu’on ait signalé l'avoir vu seul dans la journée dormant sous le soleil brûlant.

Samba a été emmené à notre dortoir d'urgence où il a passé plusieurs jours à se remettre de son épreuve. Après que nos éducateurs de rue aient gagné sa confiance, il leur a dit qu'il voulait participer au programme de couture, car sa première ambition avait toujours été de devenir un grand tailleur. Il a été inscrit au programme. Maison de la Gare a rencontré son marabout et a obtenu son accord. Samba est retourné dans son daara et y vit, sous la surveillance ponctuelle du personnel de Maison de la Gare pour qui s’assurent que les pires abus ne se reproduisent.

Samba est venu régulièrement au centre de Maison de la Gare pour participer au programme de couture, évitant autant que possible son daara. Il a été un étudiant calme, mais très bon, apprenant rapidement et bien. Maison de la Gare est devenue sa famille, soignant ses blessures et lui apportant confort et soutien psychologique dans sa vie très difficile. La couture est pour lui une passion, qui lui permet de se concentrer et de trouver un but. Il déclare : « Je veux devenir aussi bon que mon instructeur Baka. Après la formation, je vais animer des ateliers et aider les enfants qui en ont besoin. »

Samba est très ambitieux et a fait de grands progrès dans le programme de couture. Il a obtenu d'excellentes notes lors des évaluations et se réjouit de l'avenir et de pouvoir s'occuper de sa mère.

Ibrahima

Ibrahima est né en Gambie d'un père mécanicien vivant maintenant à Dakar et d'une mère vendeuse de produits sur le marché de Saint-Louis. L'équipe des rondes de nuit de Maison de la Gare l'a trouvé endormi dans le marché, couvert de sacs de riz vides. L'équipe l'a emmené au dortoir d'urgence de Maison de la Gare, où nos éducateurs de rue ont travaillé patiemment avec lui pour connaître son histoire.

Ibrahima est l'aîné de six enfants nés de plusieurs pères différents. Il a grandi en Gambie avec sa grand-mère maternelle jusqu'à l'âge de cinq ans, où il a été envoyé à Louga chez une tante maternelle, où il est resté pendant plusieurs années.

La mère de Ibrahima a déménagé à Saint-Louis, mais elle ne pouvait pas s'occuper de lui en raison du nombre d'enfants et de son faible revenu provenant de la vente d'eau fraîche et de jus au marché. Il a été envoyé dans un daara dans le quartier de Darou à Saint-Louis. Les conditions de vie y sont intolérables et il n'arrive souvent pas à mendier assez d'argent pour satisfaire le quota quotidien que lui demande son marabout. Son seul refuge était la rue.

Le daara de Ibrahima était particulièrement mauvais, sans porte, ni fenêtre, ni lumière, et situé dans un quartier dangereux et sans sécurité. Pendant la saison hivernale, les enfants étaient livrés à eux-mêmes, sans protection contre le froid, alors que le marabout vivait à côté. En raison de ces conditions, Ibrahima a fugué à plusieurs reprises, ce qui a amené notre équipe de rondes de nuit à le trouver à la place du marché.

Après quelques jours passés au centre de Maison de la Gare, Ibrahima a commencé à participer à nos programmes, jouant dans la cour avec d'autres talibés et parlant avec notre personnel. Notre équipe a trouvé qu'il était très poli, et courageux à propos de sa situation. Il a vu les apprentis impliqués dans le programme de couture et voulait vraiment y participer. Il a été accepté dans le programme et a travaillé très assidûment et avec succès. Grâce à ce programme, Ibrahima a maintenant un avenir prometteur.

Comme il le dit lui-même : « Ce n'était pas facile pour moi, car ni mon père ni ma mère ne me soutenaient ou ne se souciaient de moi. J'ai passé des années dans le daara et dans la rue, à me débrouiller seul. Maintenant, grâce à ce projet, j'ai pu trouver ma place dans la société. J'espère devenir un grand tailleur et pouvoir aider ma mère, qui n'a pas les moyens de subvenir à ses besoins. »
_______________

Merci encore à GO Campaign de Californie pour sa subvention qui a rendu possible le programme de Samba et Ibrahima, et à tous nos donateurs qui continuent à nous soutenir et qui permettront à de nombreux autres jeunes de suivre les traces de Samba et Ibrahima. Les noms de Samba et d'Ibrahima ainsi que leurs lieux d'origine ont été modifiés dans ce rapport.